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Blog Télémédecine - Psy


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20191126UnGrandSoir

Par Toll Antheaum, le 30 novembre 2019.

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20191126* Un grand soir.

   La télémédecine bouleverse, renverse l'ordre établi. Telle est médecine. L'Assurance Maladie assure la maladie. C'est la maladie assurée. On entend bien le double sens de cette tournure de phrase. La persuasion, l'assurance, nous fait croire qu'une maladie assurée est en quelque sorte remboursée, dédommagée. On pourrait simplement dire que les soins sont remboursés. On appellerait cela Remboursement des Soins. Avec cette consolation, l' "Assurance Maladie" porte avec elle une autre signification, inavouée, inouïe et qui est appelée mauvais esprit lorsqu'elle traduit qu'elle rend malade avec certitude. Il n'y a rien de méchant cependant à dire cela que d'autres ont qualifié, beaucoup plus sadique, de pulsion de mort ; mais dire simplement que l'"assurance maladie" garantit qu'elle entretient, garde ou porte, apporte, la maladie de manière sûre et certaine, ne veut pas dire qu'elle soit forcément mortelle.

   Tel est l' Ordre Établi ; ce n'est pas non plus très bouleversant de le dire, d'autres l'ont affirmé avec plus de hargne. Je pense à Jacques Attali et son livre L'Ordre Cannibale qui fait le titre de sa description de l'histoire de la médecine. Dire simplement que la télémédecine renverse l'ordre établi positionne simplement le progrès en place. Le bouleversement se situe dans l'ignorance dérangée quand, en prenant du recul, elle est sortie du flou dont l'assurance maladie se faisait croire une assurance santé. La santé est assurée par la médecine ; l'assurance santé bouleverse l'ordre établi. Pour en approcher l'idée, on raconte qu'en Chine, on payait son médecin lorsqu'on était bien portant. Pour s'en faire une certaine idée on cherche la formule dont on puisse s'assurer que telle est médecine.

   J'ai ce soir décrit devant l'Assurance Maladie mon agenda individuel de prise de rendez-vous. Aussitôt fut-il entendu qu'on parla d'agenda partagé. L'"agenda partagé" on sait ce que c'est, c'est un chic à la mode, une prouesse de l'informatique qui permet de se fondre dans un agenda collectif. Plus tard le poulain de l'Assurance Maladie piaffait du scandale qu'on put distribuer à tout vent les informations partagées ; il promettait que dans sa maison commune, ce qui serait partagé lui appartiendrait, à ladite maison, son entreprise. J'avais l'occasion de lui dire dans le brouhaha partagé, que mon agenda individuel était individuel, tel était-il, afin que son information restât la propriété du cabinet que chaque médecin doit assurer à sa clientèle. Je soulignais que sa sécurité était totale, du meilleur niveau qu'on put désirer, que le caractère privé des données était plus que partout ailleurs respecté. Il fit « Aough! » et se tînt coi. Ah bon, alors oui, bon;. si c'est comme ça.. voilà dans la pétaudière une bonne parole qui passe un instant, engloutie aussitôt.
   J'en vis une autre, jeune exigeante, qui réclamait qu'on eut un moyen, et si par bonheur un outil, même ! pour qu'on parlât ensemble. Je lui dit que c'était cela, ce réseau communautaire de gestion, l'autre chose que je venais de présenter. Son jeune voisin, pas moins monté sur ses chevaux déclara que des réseaux de gestion, il y en a par centaines et que.. personne ne s'en sert.
   Le poulain sus-cité dit aussi que des agendas il y en a à la pelle.
   L'Assurance Maladie n'avait plus trop à dire.. 
   Ça roulait.

   Nous n'avons plus trop parlé de la télémédecine, c'est un problème dont on ne sait pas où l'aventure mène. On doute simplement que ce soit une aventure. En fait, on pense que c'est un truc à encadrer ; comme un cheval, entre les brancards, on connaît ça en médecine. L'Assurance Maladie s'y entend ; le soin remboursable en télémédecine doit être encadré, la maladie assurée se garantit d'une telle médecine qu'elle n'ait pas lieu sans ses conditions. Une fois posées, ces conditions seront celles qu'elle aura prévenues dans son cadre, les conditions d'une maladie assurée. Mais la médecine est une affaire entre un médecin et son patient, à un point qui n'a pas lieu dans le désordre de.. la maladie. A ce point, le brouhaha s'occupe de ce que ça veut dire : la maladie est désordre ; comment pourrait-on saisir de manière ordonnée ce qui est désordre ? La maladie ne peut être comprise, surprise, que par un acte médical que seuls le médecin et son patient peuvent garantir. Tout autre garantie d'un tel acte est une assurance maladie. Certes l'histoire nous a prévenu ; la distribution du soin ne peut être laissée à la seule autorité du soignant - qu'on appelle dans ce cas 'sorcier' ou 'sorcière'. Mais elle nous a aussi promis que la maladie assurée qui aura mis fins à ces soins incertains, serait à son tour démise, comme un échafaudage, comme un brancard à l'usage révolu - Sade entre-temps nous aura dit que la même maladie se défendra, comme il le voyait à son âge des échafauds. Et puis l'électricité s'est enfin faite et faite cybernétique, dévoilant le fin de sa promesse : telle est médecine. La médecine réelle, finalisée, authentique, est celle qui est donnée à un médecin et son patient, pour communiquer entre eux à distance. La législation la définie de tous moyens et outils, tous interfaces. Vivement l'assurance maladie l'a brisée, détournée en la cadrant, la brancardant ; par "tous" interfaces, seul l'obligé qui interdit les autres. Ainsi l'ordre est fait. L'ordre établi ne connaît pas ce qui le renverse.
Nous en sommes restés là.

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* : l'événement que le texte relate a eu lieu en 2014 au Maroc lors d'un congrès d'étude et conception de Communauté Professionnelles ; le texte présent ranime sa mémoire pour une étude de fiction abstraite.